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mardi 13 avril 2010

Séjour dans les hautes Andes

Au moment d'écrire ces lignes, nous profitons de quelques heures de vacances à Huari, la ville la plus proche de Huamparan, le petit village andin où nous nous étions rendus pour remettre sur pied le projet de petites maternelle en milieu rural. L'an dernier, nous avions financé trois petites écoles dans différents secteurs de Huamparan, qui se déploie sur un vaste territoire au sein duquel on ne peut circuler qu'à pied ou à dos d'âne. S'il n'y avait eu qu'une maternelle au centre du village cela aurait signifié une ballade quotidienne de quelques kilomètres dans des sentiers de montagne très abrupts pour de jeunes enfants de 3 ou 4 ans. D'où la nécessité d'organiser plusieurs écoles dispersées sur l'assiette municipale.
Après une année de fonctionnement, deux des trois écoles ont dû être fermées pour diverses raisons. Cette semaine nous avons consolidé celle qui restait, dans le secteur dit «Ogopampa», en la déménageant de local et en formalisant l'embauche d'une nouvelle «promotora» qui avait dû remplacer la première au pied levé en cours d'année 2009. Elle s'appelle Rosita et semble travailler de manière très consciencieuse, tout en montrant une grande facilité d'adaptation à sa classe de 10 ninos. Elle parle couramment le quéchua, la seule langue qu'ils comprennent bien.
Pour la deuxième école, nous avons suivi les recommandations de notre coordonnateur sur place, le professeur Ricardo Asuncion, qui compte 28 années d'expérience dans l'enseignement du primaire en milieu rural et nous avons déménagé le site de l'école dans un autre village qui s'appelle Oshapampa. Comme Huamparan, celui-ci compte plusieurs secteurs dont celui de Yanagaga. C'est là que nous avons transporté tout le matériel et embauché un nouvel animateur, un «varon» (homme) cette fois. Yanagaga est un secteur pratiquement coupé de relations avec l'extérieur. Pas d'électricité, pas de route carrossable, pas de magasins, etc. La seule façon d'y accéder, c'est de grimper la longue et raide pente (subida) à pied ou à dos de cheval. Léandre a fait l'expérience de ce dernier moyen de transport pendant que Daniel combattait le «seroche» (mal des hauteurs) en grimpant le sentier boueux menant au local où se situait la future école. Il s'agit d'une ancienne pharmacie-vétérinaire (les mêmes remèdes pour les humains et les chevaux!!!) recyclée en local communautaire. Gros avantage, ce local est percé d'une fenêtre, en plus de jouir d'une porte vitrée et de murs intérieurs peints en blanc. De sorte que même sans électricité, il y a suffisamment d'éclairage pour permettre la lecture et l'écriture. Pour nous, presque rien à faire pour l'aménager, sauf transporter nos meubles (chaises et tables) ainsi que le matériel scolaire depuis Huamparan. Presque rien ce serait s'il n'y avait pas cette montée d'une heure à dos de cheval ou à pied, après une demi-heure de combi depuis Huamparan.
Monica, Celectina, Ricardo et moi avions mobilisé deux chevaux pour transporter le matériel scolaire et Monica (qui n'était pas assez en forme pour gravir la pente à pied). Assez impressionnant comme voyage à rebours dans le temps (des photos suivront pour mieux se rendre compte de la chose). Puis deux hommes de la communauté de Yanagaga sont partis à cheval pour récupérer nos deux tables et quatre bancs à Huamparan. Il doit y avoir pas moins de 10 km entre des deux villages, dans les chemins tout en montées et descentes. Heureusement, ils connaissaient des pistes ancestrales tracées dans les hauteurs de flancs de montagne. Ce qui leur a permis de se rendre en moins d'une heure, de charger deux tables et deux bancs sur leur cheval et deux autres bancs sur leurs propres épaules et de revenir à pied chez eux, comme s'il s'agissait d'une petite balade dans leur ordinaire! Je n'en revenais tout simplement pas.
Nous avons rencontré les parents, les hommes devant, autour de nous, et les femmes assises à l'écart, silencieuses, tricotant ou filant la laine de leurs moutons. Tout le contraire de Huamparan, où les femmes s'occupent presque seules de l'éducation de leurs enfants et s'assoient directement autour de nous. Les hommes semblaient se préoccuper beaucoup du futur de leur communauté et ont jasé de plusieurs projets possibles avec Ricardo. Ils parlaient dans un mélange de quéchua et d'espagnol qui était difficile à comprendre pour nous, mais qui créait une belle complicité avec Ricardo, Celestina, les seuls de notre groupe à pouvoir se débrouiller en quéchua. On a ensuite partagé avec eux un déjeuner de «papas» (patates) arrosé de thé à la menthe. Le contact a été franc, cordial et direct entre nous, les gringos (pour une fois, je n'étais pas le seul puisque les limenos sont aussi considérés comme des gringos à leurs yeux de provinciaux) et eux, les chollos, les paysans qui sont nés directement de la terre sur laquelle leur lignée subsistait depuis 3 000 ans. Ils en auraient beaucoup à nous apprendre, malgré que ce soit nous qui leur apportons une école.
Les enfants ont reçu leur matériel scolaire. Puis leurs yeux se sont émerveillés en apercevant les jouets que Celestina et Monica avaient ramenés de Lima, jouets et vêtements qui venaient de leur propre famille et n'étaient plus utilisés. Puis la classe a débuté, sans autre cérémonie, avec une séance de casse-tête de bois que les enfants voyaient et manipulaient pour la première fois de leur vie. Le promotoro circulait au milieu d'eux en les aidant gentiment. La petite ruche bourdonnait pendant que les parents s'éloignaient discrètement sur leur monture.
Moins chanceux, nous sommes revenus au bercail à pied, car le combi qui devait nous récupérer au bas de la pente nous a fait faux bond (une habitude par ici). Heureusement, après deux heures de marche, une camionnette qui passait par là nous a récupérés et c'est debout dans la boîte du camion que nous avons franchi les derniers kilomètres, dans la poussière et les bosses. Faute de cheval à quatre pattes ce fut mon initiation aux chevauchées en montagne!!!
En plus de deux écoles, Ricardo nous a proposé un troisième projet, dans la mesure où notre budget le permettait : un atelier d'initiation à l'artisanat ancestral dans le village où il enseigne, soit Chaupiloma. Un village tout aussi inaccessible, mais à 500 mètres plus haut que Yanagaga, lui-même à 200 mètres plus haut que Huamparan qui lui se trouve à 300 mètres au-dessus de Huari. sachant que Huari se trouve à 3 100 mètres au-dessus du niveau de la mer, faite le calcul pour chaupiloma et vous arriverez à 4 000 mètres, dont 800 que nous avons grimpés à pied, accompagné d'un bon mal de tête. Les enfants de Chaupiloma pourront suivre des cours avec des artisans locaux qui leur enseigneront les techniques de travail du bois (ustensiles de cuisine entre autres), et de tissage. Ricardo a plusieurs projets de ce type en cours et se pose en fier défenseur de la culture quéchua. Il exporte les produits artisanaux jusqu'en Italie et ambitionne de maintenir en place la population rurale plutôt que d'en faire un réservoir de main-d'oeuvre bon marché pour Lima. Nous n'avons pu faire autrement que de l'appuyer, malgré la petitesse de nos moyens.
Ainsi s'achève notre périple dans les Andes, un autre Pérou, tellement il est différent de ce qu'on peut voir et entendre sur la «costa», la zone côtière et plus développée du pays. Mais dont le berceau est ici, dans la sierra, aussi bien que dans la jungle amazonienne, à moins de 200 km d'ici.
À plus tard.
Daniel

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